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APRÉS 5 ANS D'ECOANTIBIO, OÚ EN EST L'ANTIBIORÉSITANCE?

Mardi 03 avril 2018

APRÉS 5 ANS D'ECOANTIBIO, OÚ EN EST L'ANTIBIORÉSITANCE?

Le lien antibiorésistance chez les animaux et santé publique

 

En 2050, au rythme actuel de l'évolution des résistances et si aucun changement notable n'est observé, l'antibiorésistance pourrait être responsable de 10 millions de morts par an dans le monde, ce qui en ferait la deuxième cause de mortalité humaine après les cardiopathies ischémiques. L'usage (ou le mauvais usage) d'antibiotiques est par ailleurs le principal facteur de sélection des résistances.

En 2016, il a été vendu en France 786 tonnes d’antibiotiques destinés à la santé humaine et 514 tonnes destinés à la santé animale. En santé humaine, plus de 90 % des antibiotiques sont consommés en médecine de ville et 7% dans les établissements de santé. En santé animale, 96 % des antibiotiques sont consommés par les animaux destinés à la consommation humaine et 4% par les animaux de compagnie (source Anses).

 

La plupart des familles d’antibiotiques vétérinaires sont aussi autorisées chez l’homme. Toutefois, chez les animaux d’élevage, les familles les plus utilisées sont assez différentes. En médecine humaine, plus des deux tiers des prescriptions sont à base de bêtalactamines alors que cette famille représente moins d’une prescription sur cinq chez les animaux. À l’inverse, des familles peu utilisées chez l’homme sont privilégiées chez les animaux comme les tétracyclines, les sulfamides et la colistine (polypeptide).
 
 
 
Les dangers pour l'homme liés à l'usage des antibiotiques en médecine vétérinaire sont:
  • la sélection d'agents pathogènes zoonotiques résistants passant de l’animal à l’homme (par contact direct, via la chaîne alimentaire ou par l'environnement)
  • le développement de résistance sur la flore commensale et le passage des gènes de résistance à l’homme par la chaîne alimentaire ou l'environnement
  • le rejet d’antibiotiques dans l’environnement et les résidus antibiotiques dans les aliments

 

Aujourd'hui, la plupart des résistances en médecine humaine ne sont toutefois pas liées aux usages vétérinaires des antibiotiques. Il est estimé qu'environ 4% des résistances humaines seraient d’origine animale et cela concernerait en général des agents faiblement pathogènes.
 

 

L’exposition des animaux aux antibiotiques a diminué de 37% en  cinq ans!

 

Depuis 1999, l'Anses a mis en place un suivi annuel des ventes d'antibiotiques vétérinaires. Le tonnage d'antibiotiques vendus en filière animale était de 1311 tonnes en 1999, il a donc été diminué de plus de 60% en un peu moins de 20 ans (514 tonnes aujourd'hui). Cependant la diminution globale du volume des ventes d'antibiotiques observée a pu s'expliquer, durant des années, en partie par une augmentation de l'utilisation des Céphalosporines de 3ième génération (C3G) et 4ième (C4G) génération et des Fluoroquinolones plus récentes et plus actives. Ces antibiotiques doivent aujourd'hui être réservés au traitement curatif en deuxième intention (réalisation d'un antibiogramme).

Les volumes de ventes d'antibiotiques ne traduisent donc pas précisément leur utilisation. L’ALEA (Animal Level of Exposure to Antimicrobials) a été créé afin d'estimer le niveau d’exposition réel des animaux aux antibiotiques. Cette variable prend en compte, en plus des quantités d'antibiotiques consommés, la durée de traitement, la posologie et l'évolution de la population animale au cours du temps.

 

Le plan national Ecoantibio, effectif en médecine vétérinaire depuis 2012, visait une réduction de 25 % de l’usage des antibiotiques (toutes familles confondues) en 5 ans tout en restreignant l’utilisation des céphalosporines (C3G et C4G) et des Fluoroquinolones. Toutes espèces animales confondues, l’exposition globale a diminué de près de 37 % en France sur les cinq dernières années. La baisse de l’exposition aux antibiotiques a été observée pour toutes les espèces par rapport à l’année 2011 (bovins : -24%, porcs : -41%, volailles : -43%, lapins : -38%, chats et chiens : -19 %).

Concernant l’exposition spécifique aux Fluoroquinolones et aux Céphalosporines de dernières générations, elle a respectivement chuté de 75% et 81% par rapport à 2013 (données Anses, cf. rapport Ecoantibio ci-dessous)

 

Le plan Ecoantibio 2 va bientôt démarrer. Les objectifs globaux sont d'évaluer les impacts du premier plan, d'en valoriser les résultats et de poursuivre la dynamique en consolidant les acquis et en poursuivant les actions précédemment engagées. Ecoantibio 2 vise également à maintenir dans la durée la tendance à la baisse de l'exposition des animaux aux antibiotiques.

 

 

Surveillance de l’antibiorésistance, Resaspath (Réseau d’épidémiosurveillance de l’antibiorésistance des bactéries pathogènes animales)

 

Ce réseau surveille depuis 35 ans les bactéries pathogènes en France. Il a débuté avec les bovins en 1982, le porc et la volaille en 2001, puis l'ensemble des espèces animales depuis 2007 (chiens, chats, chevaux, etc.). En 2016, il  a collecté près de 54 000 antibiogrammes. La répartition des antibiogrammes par espèce animale est la suivante : volailles (25,1 %), bovins (23,6 %), chiens (22,6 %). Les chats sont en 4ième position (7 %), suivis des chevaux (6,8 %) et des porcs (6,5 %).

 

Concernant les antibiotiques critiques, en 2016, les proportions de résistance aux fluoroquinolones restent globalement supérieures à celles aux C3G/C4G, quelles que soient les espèces animales. La proportion la plus élevée de résistance aux C3G/C4G se situe autour de 5 à 7 %, elle est retrouvée chez les veaux, les chiens et les chats et les équidés. La filière bovine est celle présentant la proportion de résistance aux fluoroquinolones la plus élevée (16,5 %).

 

Concernant la colistine, la situation est maîtrisée sur 10 ans, avec une augmentation significative de la proportion des souches sensibles.

 

Pour les autres antibiotiques, sur 10 ans, la diminution de la résistance à la tétracycline dans les filières volailles, et dans une moindre mesure dans la filière porc, est le phénomène le plus marquant. En filière bovine, où les niveaux de résistance à l’amoxicilline, à la tétracycline et aux aminosides (hors gentamicine) sont très élevés, il n’y a que très peu d’évolutions depuis dix ans.

 

La multirésistance a été définie comme la résistance à au moins trois antibiotiques parmi les cinq (quatre chez le chien) antibiotiques de familles différentes testés (ceftiofur, gentamicine, tétracycline (pas chez le chien), enrofloxacine ou marbofloxacine, association triméthoprime-sulfamides).Sur la période 2011-2016, la proportion de souches multi-résistantes est en diminution significative dans toutes les espèces.Elle est la plus forte chez les bovins (19,2 %) et les porcs (13,2 %). Elle est beaucoup plus faible chez les volailles (5,3 % chez les poules/poulets et 2,7 % chez les dindes).

 

Le Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM) est isolé de prélèvements infectieux animaux en France à des fréquences variables. La proportion la plus élevée est de l’ordre de 5 % (chez les équidés).  Cette résistance a surtout été décrite en portage chez le porc. Chez le chien, la proportion de SARM est très faible (1-2 %), et la plupart sont des clones humains. Les résultats suggèrent une baisse de la prévalence des SARM chez les chiens, chats et équidés.

 

 

 La situation de la Corse et la place du vétérinaire libéral?

 

Un groupe de travail piloté par l’agence régionale de santé (ARS) s’est récemment créé pour étudier la situation de la Corse vis à vis de l’antibiorésistance en santé publique. En santé humaine, la consommation d'antibiotiques en Corse est supérieure à la moyenne nationale avec 31,1 doses consommées par jour pour 1000 habitants en 2017 (contre 29,9 pour l'ensemble de la France). Le GTV Corse a été consulté concernant la partie animale pour identifier des possibles parallèles entre santé animale et santé publique. Vu les conditions relativement extensives de l’élevage insulaire, l’utilisation des antibiotiques devrait être moins importante qu'en France continentale. Les chiffres de l’exposition nationale ne pouvant être régionalisés, la situation réelle de la Corse concernant la consommation d'antibiotiques en santé animale ne peut être dissociée pour l'instant de celle de la France continentale.

 

Concernant les résistances, aucun laboratoire insulaire ne fait actuellement partie du Resapath qui surveille les résistances au niveau national. Par conséquent, les antibiogrammes d'animaux prélevés en Corse ne remontent pas officiellement dans les données nationales. Les éventuelles spécificités de la Corse concernant les résistances des animaux aux antibiotiques en Corse ne sont donc pas connues.

 

Il est rappelé aux vétérinaires praticiens que depuis le 1er avril 2017, la déclaration des cessions de médicaments contenant des substances antibiotiques est obligatoire (décret no 2016-1788 du 19 décembre 2016). Pour le moment, ce décret n'est pas appliqué officiellement car l'arrêté inter-ministériel correspondant n' a pas encore été publié. Un réseau de vétérinaires référents et experts a été récemment constitué et il alimente un forum de discussion et d'échange de documents sur les stratégies de diagnostic et de traitement antibiotiques. Tous les vétérinaires praticiens ont accès à cette plateforme (inscription avec le numéro d'ordre)  http://www.antibio-ref.fr/

D'autre part, la DRAAF de Corse a pour objectif d'organiser deux colloques Ecoantibio d'ici 2021.

 

Vous pouvez télécharger ci-dessous les rapports de l'Anses concernant l'exposition des animaux aux antibiotiques et la surveillance des antibiorésistances ainsi que la plaquette du ministère de l'agriculture sur le plan Ecoantibio 2 à venir.

 

SGA